Une startup suisse repense la bureautique d’entreprise

L’outil Hardah Business, lancé récemment à Lausanne, ambitionne de renouveler le « bureau » informatique, vieux de 20 ans. La solution facilite la collaboration en entreprise, en créant des cercles par équipe pour le partage d’informations.

Par Joan Plancade de Bilan

David Delmi, fondateur d’Hardah, présentait jeudi soir la solution informatique Hardah Business dans les locaux de Tesla LausanneCrédits: DR

S’attaquer au marché de Microsoft, le projet de la jeune pousse lausannoise Hardah est pour le moins ambitieux. Raison peut-être du choix des locaux de Tesla à Lausanne pour la soirée de lancement, clin d’œil à la startup californienne qui affronte sans complexe les géants de l’automobile.

A l’origine de la solution informatique, David Delmi, 24 ans, distingué parmi les «100 suisses les plus influents dans le digital» par Digitalswitzerland, qui relève l’obsolescence de la bureautique classique, ses outils et son organisation, vieille de 20 ans: «Le travail de bureau s’effectue de plus en plus en mode projet, par équipe. Or les infos sont dispatchées dans plus d’une dizaine d’outils. Un gestionnaire de tâche comme Asana, une ou plusieurs Dropbox pour les documents, Slack pour le chat, Google drive pour le partage collaboratif… C’est très difficile pour les collaborateurs d’avoir une vue d’ensemble sur un projet donné, de tout retrouver, mais aussi très cher pour une entreprise de payer plusieurs abonnements.»

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«Couteau suisse» de la bureautique

Hardah Business propose en réponse une nouvelle interface qui intègre une quinzaine de fonctionnalités autour d’un concept simple à l’ergonomie léchée: le cercle de collaboration. L’outil permet aux membres d’une équipe de travail de visualiser et d’accéder à l’ensemble des informations communes sur le projet, et d’en partager de nouvelles. Documents, messages à destinataires multiples, photos, agrégateur de contenu, réseau social d’entreprise…ce sont au total 15 fonctionnalités qui ont été développées en propre par Hardah depuis deux ans, soit plusieurs centaines de milliers de lignes de code.

La méthode d’Hardah a été de poser très rapidement, dès 2016, une version de travail de base, puis de la proposer en test à des entreprises partenaires dont IBML’Oréal ou encore Carrefour. C’est suite à leur retour, sur des fonctionnalités à améliorer ou apporter, que s’est construit le produit, notamment son orientation business.

Argument essentiel mis en avant par Hardah, la sécurisation des données, entièrement stockées sur le cloud suisse du partenaire Hidora. «Le fait constaté est que faute d’un outil simple, les équipes communiquent entre elles via des conversations de groupe sur Facebook. Des informations, souvent confidentielles, directement commercialisables par le réseau social. C’est un danger pour les organisations. Nous donnons la garantie fournie par la loi suisse sur la protection des données.» Un sécurité qui à un prix, Hardah Business étant payant par abonnement, quand la plupart des messageries, dont Slack, sont gratuites.

Grandir à l’ombre de Microsoft

Le marché sur lequel tente de percer Hardah est largement dominé par Microsoft comme le rappelle David Delmi: «Sharepoint de Microsoft représente 50% du marché pour l’intranet d’entreprise. Sauf que pour se servir bien de l’outil, c’est jusqu’à trois semaines de formation, très complexe donc très frustrant pour l’utilisateur.» Hardah estime sa solution maitrisable en moins d’une demi-heure.

Simple d’utilisation, la solution n’intègre toutefois pas les fonctionnalités les plus complexes des outils Microsoft. Elle ne propose pas non plus de vidéoconférence. Pour David Delmi, une complémentarité avec le géant informatique est envisageable dans un premier temps: «Pour les PME, c’est un outil très abordable, qui est une porte d’entrée vers la digitalisation. Pour les corporate, elles peuvent combiner la simplicité de Hardah, pour l’utilisation quotidienne des équipes, aux fonctions plus pointues d’autres outils pour des besoins précis. Quant aux fonctionnalités, il est impossible de prétendre à l’exhaustivité. Ce que l’on vise à terme, c’est de pouvoir intégrer des applications efficaces autour du cercle de collaboration. Comme Skype par exemple pour les visioconférences.»

Hardah va donc devoir faire ses preuves sur un marché de la bureautique compétitif et dominé par de grands acteurs. L’entreprise affirme avoir déjà des contacts auprès d’universités, de multinationales, mais aussi de certains cantons. Le premier produit à peine lancé, la startup voit déjà loin: «Nos contacts actuels sont dans le pays, précise David Delmi, mais le challenge à l’avenir va être de s’exporter hors de Suisse. C’est un objectif qui va nécessiter de nouvelles levées de fonds.»